Il arrive que la tristesse prenne le pas sur tout. Qu'elle envahisse les pensées. Et qu'elle ne veuille pas partir, malgré tout les effort que l'on peut faire pour penser à autre chose. Cela ne t'arrive pas souvent, d'avoir les idées tristes à ce point. Bien sûr que ta vie d'avant te manque, mais tu essaye de ne pas y penser. D'y penser le moins possible. De ne te concentrer que sur le présent. Sur le futur. Mais pas sur le passé. Il est dur de garder espoir. De se dire que peut-être, on pourra partir d'ici. Que l'on retrouvera sa famille. Parce que, oui, tu avais une famille. Une famille qui t'attendait surement. Un grand frère. Un petit frère. Des parents. Enfin. Un parent. Tu ne te souvenais que peu de ton père. Il était mort il y a longtemps...

Tu ne voulais pas rester en ville, alors tu avais été à la plage. C'était un endroit paisible, quand il n'y avait pas de nouvelle cargaison de gens déposés sur l'île, bon gré, mal gré. C'était calme, actuellement. Tu étais assise, là, dans le sable, non loin des vagues, à regarder l'horizon. Tu te rappelait d'une comptine que ta mère te chantais souvent quand tu étais petite...

« Blinka lilla stjärna där,
hur jag undrar var du är!
Fjärran lockar du min syn
likt en diamant i skyn.
Blinka lilla stjärna där,
hur jag undrar var du är!

När den sköna sol gått ner,
strax du kommer fram och ler,
börjar klar din stilla gång,
glimmar, glimmar natten lång.
Blinka lilla stjärna där,
hur jag undrar var du är! » *

Une goutte. Deux gouttes. Trois gouttes. Un petit torrent, de larmes salées. Tout comme l'océan, juste devant. Tu pleurais ces bons moments passés, en sûreté, chez toi, dans votre maison. Tu pleurais cette vie passée. Brisée par la cruauté. La peur. Les humains. Le rejet.

La vie semble toujours être du mauvais côté. Celui des gens pourris jusqu'à la moelle. Et que les bons en pâtissent toujours. L'enfer est pavé de bonnes intentions. Et le paradis de grains de sable. L'enfer est vide, tous les démons sont ici. On pourrait en citer beaucoup, des comme ça. Tu te demande encore pourquoi tu es ici, loin d'eux. Comment ça se fait, que tu te retrouve ici, au milieu de criminels et autres parias ? Oh bien sur, il n'y a pas que ça, fort heureusement, sinon tu ne serais certainement plus là. Certaines créatures n'ont rien à faire là. D'autres l'ont mérité. Enfin, non. Personne ne mérite d'être entassé sur une île où tous son emmenés contre leur gré. C'est si difficile que ça de se dire qu'un individu n'est pas une espèce entière ?... Ô douce utopie d'être accepté. Même ici les gens sont comme ça.

Tu essuya tes yeux larmoyant, quelque peu rougis et bouffis après avoir pleuré ton désespoir à l'horizon. Tu renifla même deux trois fois, ayant la goutte au nez suite à ça. Ce n'est pas en faisant ce genre de chose que tout va changer. Mais bon, ça fait du bien, il parait, de se relâcher un peu. Enfin, c'est mieux quand il n'y a personne. Tu inquiète déjà ton entourage assez comme ça, ils n'avaient pas besoin de gérer tes pleurs en plus... Tu vis une ombre se diriger vivement vers l'eau pendant une demi seconde, assez pour croire que tu rêvais éveillée. Sauf que...

PLOUF.

... Comment ça, plouf ? Vraiment ? Mais qui peut bien sauter dans l'eau comme ça ? Surtout que... Eh bien, il y a de sacrées créatures dans ces eaux salées. Assez pour dissuadez les gens de partir à la nage de l'île, en tout cas. Brrrr. Tu t'essuya à nouveau le visage avec le bas de ton tee-shirt. Bon. Euh. Tu renifle encore une fois... Ça c'est le côté embêtant d'avoir pleuré. Autant aller voir, sait-on jamais. Cette personne tombée de nulle part dans l'eau avait peut-être besoin d'aide, qui sait...

Tu remonta les pans de ton pantalon pour ensuite t'enfoncer doucement dans l'eau. Pas très rassurée, quand même. Et c'est pas très rassurant non plus. Tu continua jusqu'à voir la silhouette allongée dans l'eau. Tu te pencha pour un peu mieux voir... ... Tu lui fis un signe hésitant. Bon, en vrai, s'il te voyait faire ça, ça voudrait dire qu'il aurait gardé les yeux ouverts, et ça voulait aussi dire l'eau de mer ça pique les yeux, hein. Dans le doute...

« Euh... Salut ? »

Ouais bon, même toi tu n'étais pas convaincue de ton approche, enfin bon... Tu n'allais pas laisser cette personne rester sous l'eau comme ça. Si jamais elle ne remontais pas rapidement, tu allais la soulever. Pas de noyade sous ton nez. T'étais ambulancière, quand même.